Tarifs réglementés de vente d’électricité : augmentation rétroactive des tarifs bleus et verts ordonnée par le Conseil d’Etat

Dans deux arrêts rendus le 15 juin 2016, le Conseil d’Etat annule d’une part l’arrêté tarifaire du 28 juillet 2014, et d’autre part l’arrêté du 30 octobre 2014, de façon partielle. Il enjoint par ailleurs aux ministres concernés de prendre, dans un délai de trois mois, d’une part un nouvel arrêté fixant les tarifs « bleus » de l’électricité pour la période comprise entre le 1er août 2014 et le 31 octobre 2014, et d’autre part un nouvel arrêté fixant une augmentation rétroactive des tarifs « bleus résidentiels » et  « verts » pour la période comprise entre le 1er novembre 2014 et le 31 juillet 2015.

Un arrêté ministériel du 26 juillet 2013 avait fixé les tarifs réglementés « bleus », « jaunes » et « verts » applicables à compter du 1er août 2013. En vertu de l’article 6 de cet arrêté une hausse des tarifs « bleus » était prévue à compter du 1er août 2014, pour compenser la hausse insuffisante des tarifs ayant eu lieu à compter du 1er août 2013.

Cependant, par arrêté du 28 juillet 2014, les ministres abrogent cet article 6, supprimant ainsi la hausse prévue pour le 1er août 2014.

Les ministres ont ensuite pris un nouvel arrêté tarifaire, le 30 octobre 2014, pour fixer les tarifs réglementés applicables du 1er novembre 2014 au 31 juillet 2015, date d’entrée en vigueur de l’arrêté tarifaire suivant.

Concernant l’arrêté du 28 juillet 2014

Cet arrêté est annulé en ce qu’il méconnait les principes présidant à la fixation des tarifs.

En effet, les tarifs réglementés de vente d’électricité sont fixés par arrêtés conjoints des ministres de l’économie et de l’énergie, en fonction des coûts de fourniture.

Les ministres doivent, pour chaque tarif :

  • permettre au moins la couverture des coûts moyens complets des opérateurs afférents à la fourniture de l’électricité à ce tarif;
  •  prendre en compte une estimation de l’évolution de ces coûts sur la période tarifaire à venir;
  •  ajuster le tarif par une modulation dite de « rattrapage » s’ils constatent qu’un écart significatif s’est produit entre les coûts constatés et ce tarif, du fait d’une surévaluation ou d’une sous-évaluation de ce dernier, au moins au cours de la période tarifaire écoulée.

Or, l’arrêté attaqué abroge les dispositions de l’arrêté de juillet 2013 prévoyant une hausse à compter du 1er août 2014, seulement trois jours seulement avant cette date, alors que les fournisseurs d’électricité avaient pu déjà anticiper pleinement les effets de leur mise en œuvre.

Par conséquent, compte tenu de l’importance du niveau des tarifs réglementés « bleus » pour l’activité des fournisseurs d’électricité et le contenu des offres qu’ils proposent, l’arrêté a violé le principe de sécurité juridique, ce qui justifie son annulation.

Par ailleurs, il est enjoint aux ministres de prendre, dans un délai de trois mois à compter de la notification de la décision ici commentée, un nouvel arrêté fixant les tarifs réglementés « bleus » de l’électricité pour la période comprise entre le 1er août 2014 et le 31 octobre 2014 conformément aux principes énoncés dans l’arrêt.

Concernant l’arrêté du 30 octobre 2014

Cet arrêté est annulé, seulement en ce qu’il a fixé une augmentation trop faible pour les tarifs réglementés « bleus résidentiels » et « verts » de l’électricité.

Le Conseil d’Etat considère qu’il incombait aux auteurs de l’arrêté de procéder aux rattrapages tarifaires rendus nécessaires par les écarts observés, au moins au cours de la période tarifaire écoulée depuis le précédent arrêté du 26 juillet 2013, entre les tarifs et les coûts complets des fournisseurs historiques, calculés selon la méthode appliquée antérieurement à l’entrée en vigueur de la tarification dite « par empilement ». En outre, contrairement à ce que soutenait le ministre de l’économie, ce rattrapage ne peut être lissé sur plusieurs exercices tarifaires dès lors qu’il a pour objectif le respect de l’obligation de couverture des coûts lors de chaque exercice tarifaire et qu’il porte seulement, à titre obligatoire, sur les coûts de la période tarifaire écoulée.

Les juges du Palais Royal estiment que les tarifs « bleus résidentiels » et les tarifs « verts » ont été fixés par l’arrêté à un niveau manifestement insuffisant pour assurer le rattrapage des écarts tarifaires passés. Par conséquent, l’arrêté est annulé pour ce qui concerne ces tarifs.

Le Conseil d’Etat considère cependant que le rattrapage pour les tarifs « bleus non résidentiels » et « jaunes » était suffisant.

Par ailleurs, il est enjoint aux ministres de prendre, dans un délai de trois mois à compter de la notification de l’arrêt, un nouvel arrêté fixant les tarifs réglementés ‘bleus résidentiels » et « verts » de l’électricité pour la période comprise entre le 1er novembre 2014 et le 31 juillet 2015, conformément aux principes énoncés dans la décision, c’est-à-dire en augmentant lesdits tarifs.

Réf : CE 15 juin 2016, ANODE, n°383722 et 386078

À propos de l’auteur

COUSSY AVOCATS ENVIRONNEMENT ENERGIE URBANISME

Reconnu en droit de l'énergie et de l'électricité (CRE)
Reconnu en droit de l'environnement
Reconnu en droit de l'urbanisme
Reconnu en droit de la sécurité (CNAPS, CNAC, CIAC)

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