Dans une décision du 11 mai 2022, la troisième chambre civile de la Cour de cassation n°21-16.023 réaffirme que la clause de saisine de l’ordre des architectes préalable à toute action judiciaire ne peut porter que sur les obligations des parties au regard des dispositions de l’article 1134 du code civil (…) et n’a donc pas vocation à s’appliquer dès lors que la responsabilité de l’architecte est recherchée sur le fondement de l’article 1792 du même code.
Dès lors, seules les obligations contractuelles sont soumises à la clause de saisine de l’ordre des architectes préalablement à une action judiciaire. Ce n’est pas le cas si la responsabilité de l’architecte est engagée sur le fondement de la garantie décennale.
Tout d’abord, il convient de noter que l’article G.10 du Cahier des clauses générales du contrat d’architecte prévoit la saisine préalable du conseil régional de l’ordre des architectes avant toute procédure judiciaire, sauf conservatoire.
A cet égard l’article dispose que « En cas de différend portant sur le respect des clauses du présent contrat, les parties conviennent de saisir le conseil régional de l’ordre des architectes dont relève l’architecte, avant toute procédure judiciaire, sauf conservatoire. Le conseil régional peut, soit émettre un avis sur l’objet du différend, soit organiser une procédure de règlement amiable. En matière de recouvrement d’honoraires, la saisine du conseil régional est facultative ».
De plus, le non-respect de cette clause est susceptible de constituer une fin de non-recevoir et l’irrecevabilité de cette action n’est pas susceptible d’être régularisée par la mise en œuvre de la clause en cours d’instance.
Sur ce point la Cour de cassation s’est prononcée à ce sujet en affirmant dans une décision du 16 novembre 2017 n°16-24.642 « Qu’en statuant ainsi, alors que le moyen tiré du défaut de mise en œuvre de la clause litigieuse, qui instituait une procédure de conciliation, obligatoire et préalable à la saisine du juge, constituait une fin de non-recevoir et que la situation donnant lieu à celle-ci n’était pas susceptible d’être régularisée par la mise en œuvre de la clause en cours d’instance, la cour d’appel a violé les textes susvisés« .
Néanmoins en l’espèce, la Cour de cassation encadre les conditions d’application de la clause en ce qu’elle affirme que la clause ne peut porter que sur les engagements des parties qui font la force obligatoire du contrat, au sens de l’article 1103 du code civil.
La Haute juridiction précise que la clause n’a pas vocation à s’appliquer lorsque la responsabilité de l’architecte est recherchée sur le fondement de l’article 1792 en tant que fondement de la garantie décennale.
Au cas d’espèce, une mission de maitrise d’œuvre a été confiée à un architecte pour la rénovation d’une maison d’habitation. Le maitre d’ouvrage insatisfait en ce qu’il se plaignait de la survenance de désordres a assigné l’architecte en indemnisation de son préjudice.
La Cour d’appel avait débouté le maitre d’ouvrage de sa demande, la considérant irrecevable en ce qu’il n’avait pas mis en œuvre la clause de conciliation obligatoire et préalable à la saisine du juge prévue dans le contrat conclu avec l’architecte.
Partant, la Cour de cassation censure l’arrêt d’appel pour violation de l’article 1134 dans sa rédaction antérieure à celle issue de l’ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, et de l’article 1792 du code civil ; le maître de l’ouvrage demandant la réparation de désordres sur le fondement de la garantie décennale et cela empêche toute application de la clause.
Réf : Cour de cassation, 3e chambre civile, 11 mai 2022, n°21-16.023