Agrandir les constructions existantes ne constitue pas une extension d’urbanisation (CE 18 juillet 03 avril 2020, n°419139)

En l’espèce, par un arrêté du 17 octobre 2013, le maire de l’Ile-de-Batz a délivré à M. D… un permis de construire pour l’édification d’une maison d’habitation à l’endroit d’un espace remarquable au sens de l’article L. 146-6 du code de l’urbanisme alors en vigueur et reconnu comme tel par le schéma de cohérence territoriale (SCOT) du Léon, comme l’ensemble de l’île de Batz.

Par un arrêté du 13 décembre 2013, le maire a également accordé à M. et Mme E… un permis de construire pour l’édification d’une maison d’habitation sur une parcelle relevant de la même section (AC) et du même lieu-dit  » Mezou Grannog « .

Enfin, par un arrêté du 23 décembre 2013, le maire a accordé à M. H… un permis de construire pour l’extension d’une maison d’habitation sur une parcelle cadastrée section AC au même lieu-dit  » Mezou Grannog « .

C’est ainsi que M. F, propriétaire de terrains non constructibles situés à proximité des terrains d’assiette des projets litigieux, a saisi le tribunal administratif de Rennes aux fins d’annulation des arrêtés de permis de construire. Par trois jugements du 11 juillet 2014, le Tribunal administratif a annulé les arrêtés des 17 octobre et 13 décembre 2013 et rejeté la demande de M. F… dirigée contre l’arrêté du 23 décembre 2013.

Par une décision du 28 avril 2017, le Conseil d’Etat, statuant au contentieux a annulé les arrêts du 24 juillet 2015 par lesquels la cour administrative d’appel de Nantes a, au motif que M. F… ne justifiait pas d’un intérêt lui donnant qualité pour agir contre les arrêtés attaqués, annulé les deux premiers jugements et rejeté les deux premières demandes de l’intéressé et rejeté son appel contre le troisième jugement. Par trois pourvois, qu’il y a lieu de joindre pour statuer par une seule décision, M. F… demande au Conseil d’Etat d’annuler les trois arrêts du 19 janvier 2018 de la cour administrative d’appel de Nantes statuant dans le même sens pour le même motif.

Le Conseil d’Etat rappelle que le propriétaire d’un terrain non construit est recevable, quand bien même il ne l’occuperait ni ne l’exploiterait, à former un recours pour excès de pouvoir contre un permis de construire, de démolir ou d’aménager si, au vu des éléments versés au dossier, il apparaît que la construction projetée est, eu égard à ses caractéristiques et à la configuration des lieux en cause, de nature à affecter directement les conditions de jouissance de son bien. En l’espèce, M. F… est propriétaire de plusieurs parcelles non construites, dont une parcelle cadastrée AB n° 89 se trouvant à une centaine de mètres des terrains d’assiette des projets litigieuse. Il se prévalait de ce que les constructions autorisées étaient de nature à porter atteinte aux conditions de jouissance de son bien en ce qu’elles altéraient la qualité d’un site aux caractéristiques particulières, essentiellement naturel et identifié comme un espace remarquable au sens des dispositions de l’article L. 146-6 du code de l’urbanisme, à l’intérieur duquel se trouvaient leurs terrains d’assiette et ses propres terrains. Les juges de la Haute juridiction ont ainsi considéré qu’en jugeant que M. F…, qui ne se bornait pas à invoquer de façon générale la qualité environnementale du site, ne se prévalait d’aucun intérêt lui donnant qualité pour contester les permis litigieux, la cour administrative d’appel a entaché son arrêt d’une erreur de qualification juridique.

Concernant l’extension d’urbanisation, l’article L. 146-4 du code de l’urbanisme, dans sa version alors applicable au litige disposait :  » I – L’extension de l’urbanisation doit se réaliser soit en continuité avec les agglomérations et villages existants, soit en hameaux nouveaux intégrés à l’environnement. (…) « .

Afin de savoir si le permis de construire délivré à Monsieur H permettant l’extension de sa maison d’habitation allait à l’encontre de cet article, le Conseil d’Etat a dû en délivré une interprétation.

Il a ainsi considéré que « si, en adoptant ces dispositions [de l’article L.146-4 du code de l’urbanisme], le législateur a entendu interdire en principe toute opération de construction isolée dans les communes du littoral, le simple agrandissement d’une construction existante ne peut être regardé comme une extension de l’urbanisation au sens de ces dispositions.« 

En conséquence, M. F… n’est pas fondé à soutenir que le tribunal administratif, dont le jugement est suffisamment motivé sur ce point, aurait à tort écarté le moyen tiré de ce que l’arrêté attaqué autoriserait une extension de l’urbanisation prohibée par les dispositions citées ci-dessus.

À propos de l’auteur

COUSSY AVOCATS ENVIRONNEMENT ENERGIE URBANISME

Reconnu en droit de l'énergie et de l'électricité (CRE)
Reconnu en droit de l'environnement
Reconnu en droit de l'urbanisme
Reconnu en droit de la sécurité (CNAPS, CNAC, CIAC)

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