Un décret assouplit grandement le régime spécial applicable en forêts de protection. Il permet au ministre de procéder à une modification du classement et soumet à autorisation certaines opérations et travaux auparavant interdits purement et simplement.
Jusqu’à présent, le décision de classement ou de modification du classement était prise par décret en Conseil d’Etat (C. for. nouv., art. R. 141-9). Le décret donne désormais compétence au ministre de l’agriculture pour la modification du classement si celle-ci remplit cumulativement les trois conditions suivantes (C. for. nouv., art. R. 141-9) :
– elle a pour seul objet le retrait de certaines parcelles ou parties de parcelles du périmètre de la forêt de protection ;
– elle n’aboutit pas à ce que les retraits cumulés de parcelles ou parties de parcelles effectués par arrêté depuis le dernier décret fixant ou modifiant ce périmètre excèdent 2 % de la superficie classée en application de ce décret, dans la limite de 100 hectares au total ;
– elle ne compromet pas les enjeux qui ont motivé le classement.
D’autre part, l’interdiction pure et simple des défrichements, fouilles, extractions de matériaux, emprises d’infrastructure publique ou privée, exhaussements du sol ou dépôts en forêt de protection n’existe plus. Dorénavant, de telles opérations peuvent être réalisées en forêt de protection à l’occasion de certains travaux (C. for., art. R. 141-14).
Les travaux en question, sous réserve d’obtenir une autorisation délivrée par le préfet, sont les suivants (C. for., art. R. 141-38-10, I) :
– travaux de maintenance, réhabilitation, entretien et extension limitée d’immeubles, d’infrastructures et d’installations existantes, à condition qu’ils soient en harmonie avec le site et les constructions existantes ;
– travaux d’implantation de canalisations, de réseaux enterrés d’eau ou d’électricité ou de réseaux filaires, à condition qu’ils soient réalisés sur des emprises non boisées déjà existantes, qu’ils ne puissent être réalisés ailleurs qu’en forêt de protection, qu’ils correspondent à des nécessités techniques et que les terrains soient remis en état à l’issue des travaux ;
– nouveaux aménagements légers et nécessaires à l’exercice des activités agricoles, pastorales et forestières, dont la surface de plancher et l’emprise au sol n’excèdent pas cinquante m², à condition qu’ils soient en harmonie avec le site et les constructions existantes ;
– sur une emprise temporaire, travaux nécessaires à l’entretien et à l’aménagement d’une infrastructure publique située en dehors d’une forêt de protection, à condition qu’ils ne puissent être réalisés ailleurs qu’en forêt de protection, qu’ils correspondent à des nécessités techniques et que les terrains soient remis en état à l’issue des travaux ;
– sur une emprise temporaire, travaux nécessaires à la réalisation d’un projet d’utilité publique dont l’emprise est située en dehors d’une forêt de protection, pour la durée du chantier uniquement, à condition qu’ils ne puissent être réalisés ailleurs qu’en forêt de protection et que les terrains soient remis en état à l’issue des travaux.
L’autorisation du préfet ne peut être délivrée que si les travaux ne compromettent pas les exigences de conservation ou de protection des boisements, ne modifient pas fondamentalement la destination forestière des terrains et ne sont pas susceptibles de nuire à la conservation de l’écosystème forestier ou à la stabilité des sols dans le périmètre de protection (C. for., art. R. 141-38-10, II).
La demande d’autorisation est transmise au préfet par le pétitionnaire, par tout moyen permettant d’établir date certaine. Elle s’accompagne d’un certain nombre de pièces (C. for. nouv., art. R. 141-38-11) :
– un rapport de présentation des travaux projetés accompagné d’un calendrier prévisionnel, d’un plan parcellaire, d’un plan de la zone à l’échelle 1/10 000, des schémas d’accès et de circulation et d’un schéma indiquant la nature et l’emplacement des équipements dont la mise en œuvre est envisagée ;
– l’analyse de l’incidence des travaux projetés sur la destination forestière des lieux et les modalités de reconstitution de l’état boisé au terme des travaux ;
– une analyse des incidences négatives et positives, directes et indirectes, temporaires et permanentes, à court, moyen et long terme, du projet sur le bien-être des populations et la prévention des risques naturels, sur l’environnement, en particulier sur la faune et la flore, les habitats naturels et les continuités écologiques ainsi que de l’addition et l’interaction de ces incidences entre elles ;
– les mesures prévues afin d’éviter les incidences négatives, identifiées par les analyses prévues ci-dessus, de réduire les incidences n’ayant pu être évitées et de compenser, lorsque cela est possible, les incidences négatives du projet qui n’ont pu être ni évitées ni suffisamment réduites, en précisant les conditions de remise en état des lieux au terme des travaux qui prévoient, sans modifier fondamentalement la topographie initiale des terrains concernés, le reboisement du site en essences forestières conformément aux directives et schémas forestiers.
Le préfet dispose d’un délai de 4 mois à compter de la réception du dossier complet de la demande d’autorisation pour prendre sa décision, après consultation du conseil scientifique régional du patrimoine naturel et de la commission départementale de la nature, des paysages et des sites (formations nature et paysage). Si ces instances n’ont pas formulé d’avis dans un délai de trois mois à compter de la date de sa saisine, leur avis est réputé favorable. En revanche, le silence gardé par le préfet au terme du délai de 4 mois vaut décision de rejet (C. for. nouv., art. R. 141-38-12, I).
Le préfet statue au vu du dossier de la demande d’autorisation sur les modalités d’exécution des travaux prévus en vue de limiter leurs incidences sur la stabilité des sols, la végétation forestière et les écosystèmes forestiers ainsi que sur les modalités de remise en état des lieux au terme des travaux. Il prend acte de ces modalités dans sa décision et peut les compléter par des prescriptions particulières (C. for. nouv., art. R. 141-38-12, II).
Lorsque les modalités d’exécution des travaux ou prescriptions particulières sont méconnues, le préfet peut, après mise en demeure, ordonner leur exécution dans un délai qu’il fixe et qui ne peut être inférieur à un mois. Si le manquement persiste à l’issue de ce délai, le préfet peut ordonner la suspension des travaux, le rétablissement des lieux en l’état et, le cas échéant, son exécution d’office (C. for. nouv., art. R. 141-38-12, III).
Par ailleurs, le décret modifie la dérogation permettant la réalisation d’équipements indispensables à la mise en valeur et à la protection de la forêt, en les élargissant aux risques naturels et à l’accueil du public. Ainsi, le propriétaire peut procéder à des travaux (C. for. nouv., art. R. 141-14) :
– qui ont pour objet de créer les équipements indispensables à la mise en valeur et à la protection de la forêt, à la prévention des risques naturels, ainsi qu’à la restauration des habitats naturels et au rétablissement des continuités écologiques, en privilégiant, pour ces dernières, les solutions fondées sur la nature, sous réserve que ces ouvrages ne modifient pas fondamentalement la destination forestière des terrains, ne compromettent pas les exigences de conservation ou de protection des boisements, et à condition que le préfet, avisé deux mois à l’avance par tout moyen permettant d’établir date certaine, n’y ait pas fait opposition ;
– dans les mêmes conditions, à des travaux ayant pour but de créer des équipements légers indispensables à l’accueil du public, hors installations touristiques à caractère économique, pourvu qu’ils soient démontables et ne compromettent ni les objectifs du classement ni un retour du site à son état initial.
Pour finir, une nouvelle exception permet d’autoriser en forêt de protection les travaux de surveillance, d’entretien, de remplacement et de maintenance relatifs à des canalisations, des réseaux enterrés d’eau, d’électricité ou des réseaux filaires, à condition d’être effectués conformément à une convention entre le propriétaire des parcelles concernées et l’exploitant de la canalisation (C. for. nouv., art. R. 141-16).
