Ce député rappelle les nombreuses actions en justice appréhendées sous le coup des troubles anormaux de voisinages qui ont lieu ces dernières années : cloches de Bondons, mare aux grenouilles de Grignols, coq de l’île d’Oléron… Selon lui, ces actions sont le plus souvent intentées par des vacanciers ou des « néoruraux », qui ne supportent pas ce genre de nuisances.
Ainsi, le patrimoine immatériel des campagnes françaises est sous la menace des actions en reconnaissance d’un « trouble anormal de voisinage ». Il rappelle à ce propos que la notion de troubles de voisinage n’est pas issue directement de la loi mais qu’elle a été établie par la Cour de cassation et notamment par une décision datant de 1844.
L’élu évoque également que les sons et odeurs de la campagne n’entrent pas dans le champ du patrimoine culturel immatériel défini par l’UNESCO. Il constate que la définition en droit français du patrimoine immatériel est entièrement renvoyée à celle posée par l’UNESCO. En effet, l’article L. 1 du code du patrimoine définit cette notion :
– le premier alinéa éclaire sa portée première, « matérielle », puisque le patrimoine s’entend de « l’ensemble des biens, immobiliers ou mobiliers, relevant de la propriété publique ou privée, qui présentent un intérêt historique, artistique, archéologique, esthétique, scientifique ou technique » ;
– le second alinéa étend la portée de la notion au patrimoine immatériel, dont il prévoit qu’« Il s’entend également des éléments du patrimoine culturel immatériel, au sens de l’article 2 de la convention internationale pour la sauvegarde du patrimoine culturel immatériel, adoptée à Paris le 17 octobre 2003. »
Or, la définition posée par l’UNESCO est la suivante : « les pratiques, représentations, expressions, connaissances et savoir-faire – ainsi que les instruments, objets, artefacts et espaces culturels qui leur sont associés – que les communautés, les groupes, et, le cas échéant, les individus reconnaissent comme faisant partie de leur patrimoine culturel. Ce patrimoine culturel immatériel, transmis de génération en génération, est recréé en permanence par les communautés et les groupes, en fonction de leur milieu, de leur interaction avec la nature et de leur histoire, et leur procure un sentiment d’identité et de continuité, contribuant ainsi à promouvoir le respect de la diversité culturelle et la créativité humaine ».
Le paragraphe 2 de l’article 2 de cette convention précise que « Le “patrimoine culturel immatériel”, tel qu’il est défini au paragraphe 1 ci-dessus, se manifeste notamment dans les domaines suivants :
- « a) les traditions et expressions orales, y compris la langue comme vecteur du patrimoine culturel immatériel ;
- « b) les arts du spectacle ;
- « c) les pratiques sociales, rituels et événements festifs ;
- « d) les connaissances et pratiques concernant la nature et l’univers ;
- « e) les savoir-faire liés à l’artisanat traditionnel. »
Ainsi, les sons et odeurs de la campagne n’entrent pas dans le champ du patrimoine culturel immatériel défini par l’Unesco ».
Pour une meilleure protection des sons et odeurs des campagnes françaises le député propose de modifier le Code du patrimoine de la manière suivante :
1° L’article L. 1 est complété par un alinéa ainsi rédigé : « Il s’entend également du patrimoine sensoriel des campagnes régi par le titre VI du livre VI du présent code. »
2° Le livre VI est ainsi modifié : a) À l’intitulé, les mots : « et qualité architecturale » sont remplacés par les mots : « qualité architecturale et patrimoine sensoriel des campagnes » ;
b) Est ajouté un titre VI ainsi rédigé :
« PATRIMOINE SENSORIEL DES CAMPAGNES
« Art. L. 660-1. – Les émissions sonores et olfactives des espaces et milieux naturels terrestres et marins, des sites, aménagés ou non, ainsi que des êtres vivants qui présentent au regard de la ruralité un intérêt suffisant pour en rendre désirable la préservation peuvent à tout moment faire l’objet d’une inscription au titre du patrimoine sensoriel des campagnes, par décision de l’autorité administrative.
« Art. L. 660-2. – L’inscription au titre du patrimoine sensoriel des campagnes est effectuée d’office par l’autorité administrative ou sur demande de la commission prévue à l’article L. 660-3 ou sur demande de toute personne qui justifie d’un intérêt à le faire.
« L’inscription est prononcée après que l’autorité administrative a recueilli l’avis de la commission prévue à l’article L. 660-3, sauf dans le cas où la demande émane de cette commission.
« Art. L. 660-3. – La commission départementale du patrimoine sensoriel des campagnes comprend des personnes titulaires d’un mandat électif local ou national, des représentants de l’État, des représentants d’associations ou de fondations ayant pour objet de favoriser la connaissance, la protection, la conservation et la mise en valeur du patrimoine sensoriel des campagnes, et des personnalités qualifiées.
« La commission peut proposer toutes mesures propres à assurer la protection, la conservation et la mise en valeur du patrimoine sensoriel des campagnes.
« Son président est choisi parmi les titulaires d’un mandat électif qui en sont membres. En cas d’empêchement du président, la présidence est assurée par le représentant de l’État dans la région.
« Un décret en Conseil d’État détermine la composition, les conditions de désignation des membres et les modalités de fonctionnement de la commission.
« Art. L. 660-4. – Les nuisances sonores ou olfactives relevant des émissions inscrites sur le fondement de l’article L. 660-1 ne peuvent être considérées comme des troubles anormaux de voisinage. »
La charge pour l’État est compensée à due concurrence par la majoration d’une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.