Le cache-cache du droit

Par sa décision n° 2010-613 DC du 7 octobre 2010, le Conseil constitutionnel s’est prononcé sur la loi interdisant la dissimulation du visage dans l’espace public dont il avait été saisi par le président de l’Assemblée nationale et le président du Sénat. Il a formulé une réserve d’interprétation et jugé pour le surplus cette loi conforme à la Constitution.

 

La loi déférée dispose que « nul ne peut, dans l’espace public, porter une tenue destinée à dissimuler son visage ». Elle définit l’espace public comme « constitué des voies publiques ainsi que des lieux ouverts au public ou affectés à un service public ». Elle définit des exceptions à cette interdiction et fixe à 150 € l’amende maximale en cas de violation de cette interdiction.

 

Le législateur a estimé que les pratiques de dissimulation du visage dans l’espace public, auparavant quasi inexistantes, peuvent constituer un danger pour la sécurité publique et méconnaissent les exigences minimales de la vie en société. Il a également estimé que les femmes dissimulant leur visage, volontairement ou non, se trouvent dans une situation d’exclusion et d’infériorité manifestement incompatible avec les principes constitutionnels de liberté et d’égalité. En adoptant la loi, il a complété et généralisé des règles jusque là réservées à des situations ponctuelles à des fins de protection de l’ordre public.

 

Le Conseil constitutionnel a opéré le contrôle de proportionnalité qu’il exerce constamment pour déterminer si la loi assure entre la sauvegarde de l’ordre public et la garantie des droits constitutionnellement protégés une conciliation qui n’est pas manifestement disproportionnée.

 

D’une part, il a jugé qu’en l’espèce cette conciliation n’est pas manifestement disproportionnée eu égard aux objectifs que le législateur s’est assigné et compte tenu de la faible sanction instituée en cas de méconnaissance de la règle fixée par lui.

 

Cependant, d’autre part, le Conseil constitutionnel a jugé que l’interdiction de dissimuler son visage dans l’espace public ne saurait restreindre l’exercice de la liberté religieuse dans les lieux de culte ouverts au public. L’atteinte à l’article 10 de la Déclaration de 1789 relative à la liberté religieuse serait alors excessive. Le Conseil a donc formulé une réserve sur ce point.

 

Sous cette réserve conduisant à ce que la loi ne puisse restreindre la liberté religieuse dans les lieux de culte ouverts au public, le Conseil constitutionnel a jugé la loi déférée conforme à la Constitution.

Cons. const., déc. n° 2010-613 DC, 7 oct. 2010

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