Le législateur a voulu rendre obligatoire la phase pré-contentieuse pour alléger la charge
de travail pesant sur les tribunaux administratifs. Par la loi du 31 décembre 1987 a été
annoncée la généralisation d’une « procédure préalable, soit de recours administratif, soit
de conciliation » devant obligatoirement être utilisée avant tout recours contentieux
dans deux domaines : en matière de litiges contractuels concernant les personnes
publiques, et en matière de responsabilité extra-contractuelle de l’administration.
La généralisation annoncée n’a cependant pas eu lieu. Néanmoins, dans un certain
nombre de domaines, le recours administratif préalable (gracieux s’il est adressé à
l’auteur de l’acte, ou hiérarchique si le destinataire en est son supérieur hiérarchique ou à
une instance spécifique) est obligatoire avant tout recours contentieux. Cette obligation
se rencontre notamment en matière d’élections universitaires, en matière fiscale.
Le Conseil d’Etat, dans son rapport d’étude sur les recours administratifs préalables
obligatoires en date du 29 mai 2008 dirigé par Olivier Schrameck, a proposé d’étendre
cette pratique :
· pour les invalidations de permis de conduire consécutives à la perte de tous les
points par leur détenteur,
· en matière de fonctions publiques,
· à l’encontre de certains types de décisions en matière de droit des étrangers
· en matière pénitentiaire.
Certains textes imposent donc de saisir l’administration, avant tout recours contentieux,
d’un recours administratif, qui constitue une condition de recevabilité de ce recours
contentieux.
Il faut noter que :
· L’irrecevabilité tenant à l’absence d’exercice du recours administratif préalable est
d’ordre public, c’est-à-dire que le juge est tenu de la soulever d’office (sauf si la
notification de la décision initiale ne mentionne pas l’existence et le délai du recours
préalable).
· L’administration répond au recours préalable dans un contexte et en fonction de
circonstances qui ne sont plus celles de la décision initiale. Elle n’a pas à faire abstraction
de cette évolution.
· La formation de ce recours dessaisit l’autorité auteur de la décision initiale de tout
pouvoir sur celle-ci.
· La décision prise sur ce recours préalable se substitue dans tous les cas, quels
qu’en soient le sens ou la forme (explicite ou implicite) à la décision initiale contestée. Le
recours contentieux doit donc être formé contre cette décision et non contre la décision
initiale.
· Le juge admet aujourd’hui l’invocation dans le recours juridictionnel d’autres
moyens que ceux du recours préalable. Le contentieux n’est pas lié par les termes du
recours préalable.
Quant à la forme du recours administratif préalable obligatoire :
· La date prise en considération pour apprécier la recevabilité de la requête au
regard de la règle du délai est sa date d’enregistrement, alors même que la requête
serait irrecevable en la forme, et non la date à laquelle elle a été régularisée.
· La requête peut être introduite par télécopie ou par courriel, à condition d’être
régularisée par la suite par un courrier sur papier signé.
· La requête empêchée d’être reçue par une panne du télécopieur de la juridiction
n’est pas tardive
Quant au délai du recours administratif préalable obligatoire :
A la différence des recours administratifs préalables facultatifs qui doivent simplement
être formés avant expiration du recours contentieux qui est communément de deux mois,
les recours administratifs préalables obligatoires (dont le nombre s’élève à environ
200, voir tableau annexe) sont soumis à des délais variables : 15 jours, par exemple, en
matière d’orientation scolaire, 5 jours en matière d’élections, 1 an en matière fiscale …
Cette grande diversité peut introduire une certaine confusion. Si les recours administratifs
préalables obligatoires sont susceptibles d’épargner aux usagers de l’administration des
procédures contentieuses couteuses, toute erreur sur les délais auxquels ils sont soumis
imposera aux requérants l’abandon de leurs prétentions. Il serait donc conforme à
l’intérêt des usagers de l’administration de :
· proposer une présentation synoptique des délais auxquels sont soumis les
recours administratifs préalables obligatoires ;
· d’uniformiser les délais au sein des différentes matières si l’on admet que
l’uniformisation de tous les délais des recours administratifs préalables obligatoires n’est
ni possible ni souhaitable (la diversité des délais répond, dans une certaine mesure, à la
diversité des situations).