Site icon Urbanisme – Construction – Energie – Sécurité – Santé

Annulation d’un refus de raccordement électrique pour incompétence

TRIBUNAL ADMINISTRATIF
DE MONTREUIL
N° 1404808
___________
M. Amarjit SINGH et autres
___________
M. L’hôte
Rapporteur
___________
M. Verrièle
Rapporteur public
___________
Audience du 19 février 2015
Lecture du 5 mars 2015
___________
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
Le Tribunal administratif de Montreuil,
(2ème chambre),
49-05-06

Vu la requête, enregistrée le 28 mai 2014, présentée pour M. Amarjit SINGH,Mme Kaur PARAMJIT, Mme Amandeep KAUR, M. Baljit SINGH et M. Sarbjit SINGH, élisant domicile 23-25 avenue de la Défense du Bourget au Blanc-Mesnil (93150) ainsi que par la SCI ABC, prise en la personne de son représentant légal, dont le siège social est 16 rue de la Paix à Bobigny (93000), par Me Coussy ; M. SINGH et autres demandent au Tribunal :
1°) d’annuler la décision du 3 (lire 25) mars 2014 par laquelle le maire du Blanc-Mesnil a « refusé de raccorder provisoirement le logement des requérants au branchement collectif au 23 avenue de la Défense du Bourget (…) » ;
2°) d’enjoindre à la commune du Blanc-Mesnil, sous astreinte de 1 000 euros par jour de retard, « d’indiquer à ERDF qu’elle ne s’oppose pas au raccordement des logements des requérants au réseau d’électricité » ;
2°) de mettre à la charge de la commune du Blanc-Mesnil une somme de 1 000 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;
M. SINGH et autres soutiennent qu’ils ont intérêt à agir ; que le Tribunal administratif est compétent ; que la décision attaquée n’est pas motivée ; qu’elle a été signée par une autorité incompétente et prise en méconnaissance des dispositions de l’article L. 111-6 du code de l’urbanisme ;
Vu la décision attaquée ;
Vu, enregistré le 25 juillet 2014, le mémoire en défense, présenté pour la commune du Blanc-Mesnil, par son maire en exercice, qui conclut au rejet de la requête ;
N°1404808
La commune du Blanc-Mesnil fait valoir que la décision n’a pas été prise en méconnaissance des dispositions de l’article L. 111-6 du code de l’urbanisme, dès lors que la transformation du pavillon situé au 23/25 avenue de la Défense du Bourget en trois logements n’a fait l’objet d’aucune autorisation préalable et que la demande d’ERDF ne fait en aucun cas mention d’un branchement provisoire ;
Vu, en date du 5 décembre 2014, l’avis envoyé aux parties, en application des dispositions de l’article R. 611-11-1 du code de justice administrative, les informant que l’affaire était susceptible d’être inscrite au rôle d’une audience du premier trimestre 2015 et que la clôture d’instruction était susceptible d’intervenir à compter du 5 janvier 2015 ;
Vu, en date du 6 janvier 2015, l’ordonnance portant clôture immédiate de l’instruction ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des collectivités territoriales ;
Vu le code de l’urbanisme ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l’audience ;
Après avoir entendu au cours de l’audience publique du 19 février 2015 :
– le rapport de M. L’hôte, rapporteur ;
– et les conclusions de M. Verrièle, rapporteur public ;
1. Considérant que M. SINGH et autres ont souscrit en janvier 2014, auprès d’Electricité Réseau Distribution France (ERDF), trois contrats de fourniture d’électricité, pour des logements qu’ils occupent dans un immeuble sis 23/25 avenue de la Défense du Bourget au Blanc-Mesnil ; que, sollicité par l’opérateur public, le service technique de la voirie du Blanc-Mesnil a informé ce dernier qu’il n’autorisait pas la création du branchement collectif, par un courriel du 25 mars 2014 dont les requérants demandent l’annulation ;
Sur les conclusions à fin d’annulation :
2. Considérant qu’aux termes de l’article L. 111-6 du code de l’urbanisme : « Les bâtiments, locaux ou installations soumis aux dispositions des articles L. 421-1 à L. 421-4 ou L. 510-1, ne peuvent, nonobstant toutes clauses contraires des cahiers des charges de concession, d’affermage ou de régie intéressée, être raccordés définitivement aux réseaux d’électricité, d’eau, de gaz ou de téléphone si leur construction ou leur transformation n’a pas été, selon le cas, autorisée ou agréée en vertu des articles précités. » ; qu’aux termes de l’article L. 422-1 du même code : « L’autorité compétente pour délivrer le permis de construire, d’aménager ou de démolir et pour se prononcer sur un projet faisant l’objet d’une déclaration
préalable est : a) Le maire, au nom de la commune, dans les communes qui se sont dotées d’un plan local d’urbanisme ou d’un document d’urbanisme en tenant lieu […]» ; qu’aux termes de l’article L. 2122-18 du code général des collectivités territoriales : « Le maire est seul chargé de l’administration, mais il peut, sous sa surveillance et sa responsabilité, déléguer par arrêté une partie de ses fonctions à un ou plusieurs de ses adjoints et, en l’absence ou en cas d’empêchement des adjoints ou dès lors que ceux-ci sont tous titulaires d’une délégation à des membres du conseil municipal » ; qu’il résulte de ces dispositions combinées que le maire, compétent pour délivrer les permis de construire, d’aménager ou de démolir au nom de la commune et par conséquent pour refuser le raccordement à un réseau d’électricité, d’eau, de gaz ou de téléphone pour des bâtiments, locaux ou installations qui n’ont pas été autorisées, peut déléguer cette compétence à un adjoint, voire à un conseiller municipal ;
3. Considérant qu’il ressort des pièces du dossier que la décision du 25 mars 2014 informant ERDF de ce que le raccordement au réseau public d’électricité des logements occupés par les requérants, 23/25 avenue de la Défense du Bourget au Blanc-Mesnil, n’était pas autorisé, consiste en un courriel adressé à l’opérateur public, dont l’auteur est « Mme Richard, agissant sous couvert de M. Pivot » ; que ni la qualité ni la fonction du signataire de cette décision et de son supérieur hiérarchique ne sont précisées ; qu’en défense, la commune du Blanc-Mesnil ne verse aux débats aucune décision du maire déléguant sa signature aux deux personnes nommément désignés dans le courriel, ni ne conteste d’ailleurs le moyen soulevé par les requérants et tiré de l’absence de délégation dont aurait bénéficié l’auteur de l’acte ; que les requérants sont ainsi fondés à soutenir que la décision a été prise par une autorité ne disposant pas d’une délégation pour ce faire ;
4. Considérant qu’aux termes de l’article L. 600-4-1 du code de l’urbanisme :
« Lorsqu’elle annule pour excès de pouvoir un acte intervenu en matière d’urbanisme ou en ordonne la suspension, la juridiction administrative se prononce sur l’ensemble des moyens de la requête qu’elle estime susceptibles de fonder l’annulation ou la suspension, en l’état du dossier » ; qu’aucun autre moyen n’est susceptible de fonder, en l’état du dossier, l’annulation de la décision attaquée ;
5. Considérant qu’il résulte de ce qui précède que les requérants sont fondés à demander l’annulation de la décision du 25 mars 2014 du service technique de la voirie du Blanc-Mesnil informant ERDF qu’il n’autorisait pas la création d’un branchement collectif au réseau d’électricité, pour trois logements occupés par les requérants dans un immeuble 23 avenue de la Défense du Bourget au Blanc-Mesnil ;
Sur les conclusions à fin d’injonction :
6. Considérant que l’exécution du présent jugement implique seulement que le maire du Blanc-Mesnil procède au réexamen de la demande des requérants ; qu’il y a lieu, dès lors, de lui enjoindre de procéder à cet examen, dans un délai d’un mois à compter de la notification du présent jugement ; qu’en revanche, il n’y a pas lieu d’assortir cette injonction d’une astreinte ;
Sur les conclusions tendant à l’application des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative :
7. Considérant qu’il y a lieu, dans les circonstances de l’espèce, de faire application de ces dispositions et de mettre à la charge de la commune du Blanc-Mesnil le versement d’une somme globale de 1 000 euros aux requérants au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :
Article 1er : La décision du 25 mars 2014 du service technique de la voirie du Blanc-Mesnil informant ERDF qu’il n’autorise pas le branchement collectif au réseau d’électricité de trois logements occupés par les requérants 23 avenue de la Défense du Bourget au Blanc-Mesnil est annulée.
Article 2 : Il est enjoint au maire du Blanc-Mesnil de procéder au réexamen de la demande de raccordement au réseau public d’électricité de M. SINGH et autres, dans le délai d’un mois à compter de la notification du présent jugement.
Article 3 : La commune du Blanc-Mesnil versera une somme globale de 1 000 (mille) euros à M. Amarjit SINGH, Mme Kaur PARAMJIT, Mme Amandeep KAUR, M. Baljit SINGH,M. Sarbjit SINGH et à la SCI ABC, en application des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.
Article 5 : Le présent jugement sera notifié à M. Amarjit SINGH, Mme Kaur PARAMJIT, Mme Amandeep KAUR, M. Baljit SINGH, M. Sarbjit SINGH, à la SCI ABC et à la commune du Blanc-Mesnil.

Délibéré après l’audience du 19 février 2015, à laquelle siégeaient :
– M. Boulanger, président,
– M. L’hôte, premier conseiller,
– Mme Luyckx Gürsoy, premier conseiller,
Lu en audience publique le 5 mars 2015.

La République mande et ordonne au préfet de la Seine-Saint-Denis en ce qui le concerne et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.

Quitter la version mobile