Rejet de déférés-suspension relatifs l’interdiction d’utilisation de pesticides (TA de Cergy-Pontoise, ord. 8 novembre 2019 N° 1912600 et N° 1912597)

En l’espèce, le maire de Sceaux a, par arrêté du 20 mai 2019, interdit l’utilisation du glyphosate et d’autres substances chimiques sur le territoire de sa commune. Le maire de la commune de Gennevilliers a également interdit l’utilisation de pesticides s’agissant de l’entretien de certains espaces de son territoire.

C’est ainsi qu’au moyen d’un déféré, le préfet des Hauts-de-Seine a demandé au juge des référés du tribunal administratif de suspendre ces décisions. Or, par deux ordonnances en date du 8 novembre 2019, le juge administratif a rejeté ces demandes au motif qu’aucun des moyens soulevés n’était de nature à créer un doute sérieux quant à la légalité des arrêtés en cause.
Le juge rappelle que la police spéciale relative à l’utilisation des produits phytopharmaceutiques a été attribuée au ministre de l’agriculture. S’il appartient au maire, responsable de l’ordre public sur le territoire de sa commune, de prendre les mesures de police générale nécessaires au bon ordre, à la sûreté, à la sécurité et à la salubrité publiques, il ne saurait en principe s’immiscer dans l’exercice de cette police spéciale qu’en cas de danger grave ou imminent ou de circonstances locales particulières.
Or,  le juge des référés considère qu’il ne saurait être sérieusement contesté que les produits phytopharmaceutiques visés par l’arrêté en litige, constituent un danger grave pour les populations exposées.
Il constate que la commune de Gennevilliers, qui compte plus de 46 000 habitants, soutient  qu’elle subit une pollution considérable du fait des infrastructures majeures de transport présentes sur son territoire et que l’arrêté attaqué limite l’interdiction des produits phytopharmaceutiques qu’il liste à l’entretien des jardins et espaces verts des entreprises, des copropriétés, des bailleurs privés et privés sociaux, des voies ferrées et des tramways et leurs abords, des abords des autoroutes et routes qui la traversent, où l’usage de ces produits est encore autorisé.
La commune se prévaut, en outre, de l’importance des populations vulnérables sur son territoire et notamment celles accueillies dans ses treize écoles, trois collèges et un lycée et dans l’établissement de santé spécialisé en rééducation fonctionnelle.
Le juge rappelle également que, par une décision nos 415426-415431 du 26 juin 2019, le Conseil d’État statuant au contentieux a annulé l’arrêté du 4 mai 2017 relatif à la mise sur le marché et à l’utilisation des produits phytopharmaceutiques et de leurs adjuvants visés à l’article L. 253-1 du code rural et de la pêche maritime, notamment en tant qu’il ne prévoit pas de dispositions destinées à protéger les riverains des zones traitées par des produits phytopharmaceutiques, après avoir considéré que ces riverains devaient être regardés comme des « habitants fortement exposés aux pesticides sur le long terme », au sens de l’article 3 du règlement (CE) n° 1107/2009 et rappelé qu’il appartient à l’autorité administrative de prendre les mesures nécessaires à la protection de la santé publique.
Ainsi, il juge que dans ces conditions, eu égard à la présomption suffisamment établie de dangerosité et de persistance dans le temps des effets néfastes pour la santé publique et l’environnement des produits que l’arrêté attaqué interdit sur le territoire de la commune de Gennevilliers et en l’absence de mesures réglementaires suffisantes prises par les ministres titulaires de la police spéciale, le maire de cette commune a pu à bon droit considérer que les habitants de celle-ci étaient exposés à un danger grave, justifiant qu’il prescrive les mesures contestées, en vertu des articles L. 2212-1, L. 2212-2 et L. 2212-4 précités du code général des collectivités territoriales, et ce alors même que l’organisation d’une police spéciale relative aux produits concernés a pour objet de garantir une cohérence au niveau national des décisions prises, dans un contexte où les connaissances et expertises scientifiques sont désormais
largement diffusées et accessibles.
En conséquence,c’est à bon droit que ces maires ont considéré que les habitants de leurs communes étaient exposés à un danger grave, justifiant qu’ils interdisent l’utilisation des produits en cause.

À propos de l’auteur

COUSSY AVOCATS ENVIRONNEMENT ENERGIE URBANISME

Reconnu en droit de l'énergie et de l'électricité (CRE)
Reconnu en droit de l'environnement
Reconnu en droit de l'urbanisme
Reconnu en droit de la sécurité (CNAPS, CNAC, CIAC)

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