Réception tardive du mémoire en réclamation : seule l’entreprise diligente peut invoquer le délai anormalement long d’acheminement du courrier (CAA Lyon, 4ème chambre, 17 octobre 2019, 17LY02069)

En l’espèce, au mois de janvier 2006, la commune de Challes-les-Eaux (Savoie) a confié à un groupement constitué de la société Babylone Avenue Architectes, mandataire, et de la société Séchaud et Bossuyt, aux droits de laquelle est venue en dernier lieu la société Grontmij, la maîtrise d’oeuvre des travaux d’aménagement des espaces extérieurs de son centre-ville et de la traverse de la RN 6.

Ce marché de maîtrise d’oeuvre a été résilié par la commune au mois de juillet 2013. Elle a alors établi un décompte de résiliation dégageant un solde débiteur de 48 859,57 euros HT pour la société Babylone Avenue Architectes et de 5 807,37 euros HT pour la société Grontmij. Le 11 juin 2014, le maire a émis à leur encontre les titres exécutoires correspondant. Par une requête commune, les deux sociétés ont demandé au tribunal administratif de Grenoble de condamner la commune à leur verser respectivement 83 746,62 euros TTC et 79 878,87 euros TTC en règlement du solde de leur marché et par requêtes distinctes, elles ont demandé chacune en ce qui la concerne l’annulation des titres exécutoires et la décharge de l’obligation de payer.

La société Babylone Avenue Architectes relève appel du jugement du 14 mars 2017 en tant qu’il a rejeté ses conclusions.

Les juges d’appel rappellent qu’en vertu des dispositions de l’article 32 du cahier des clauses administratives générales applicables aux marchés publics de prestations intellectuelles, le prestataire dispose d’un délai de quarante-cinq jours à compter de la date à laquelle il a reçu notification du décompte de résiliation pour faire parvenir à la personne publique un mémoire en réclamation. Si, avant l’expiration de ce délai, la personne publique n’a pas reçu le mémoire contestant le décompte de résiliation, celui-ci devient définitif et ne peut plus être contesté. Il en irait autrement dans l’hypothèse où le titulaire établit qu’il a remis son mémoire en réclamation aux services postaux en temps utile afin qu’il parvienne avant l’expiration du délai applicable compte tenu du délai d’acheminement normal du courrier.

Or,  la commune de Challes-les-Eaux a notifié le 7 octobre 2013 à la société Babylone Avenue Architectes le décompte de résiliation. La société a adressé le 18 novembre 2013 son mémoire en réclamation à la personne publique qui l’a réceptionné le 25 suivant alors qu’il devait lui parvenir au plus tard le 21 novembre 2013.

C’est ainsi que la Cour administrative d’appel a considéré que si le délai d’acheminement du mémoire en réclamation a été anormalement long, la société Babylone Avenue Architectes ne peut néanmoins être regardée comme ayant accompli les diligences utiles pour permettre la réception de son mémoire avant l’expiration du délai de quarante-cinq jours. Ainsi, sa réclamation doit être considéré comme étant tardive, de sorte que le décompte de résiliation notifié le 7 octobre 2013 a acquis un caractère définitif et ne pouvait plus être contesté devant le tribunal administratif qui a donc justement rejeté pour ce motif ses conclusions indemnitaires, alors même qu’il a estimé, à tort, qu’elle ne pouvait utilement se prévaloir du délai anormalement long d’acheminement du courrier.

En résumé, la CAA a jugé qu’une entreprise qui poste son mémoire en réclamation 3 jours avant la date limite de réception ne doit pas être considérée comme diligente  et ne peut invoquer le délai anormalement long d’acheminement du courrier.

 

À propos de l’auteur

COUSSY AVOCATS ENVIRONNEMENT ENERGIE URBANISME

Reconnu en droit de l'énergie et de l'électricité (CRE)
Reconnu en droit de l'environnement
Reconnu en droit de l'urbanisme
Reconnu en droit de la sécurité (CNAPS, CNAC, CIAC)

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