Immeuble menaçant ruine – Qui supporte les coûts des travaux de démolition ?

La Troisième chambre civile de la Cour de cassation, aux termes de son arrêt n° 12-27.823, rendu le 05 juillet 2018, a jugé que la commune n’agit pour le compte et aux frais du propriétaire d’un immeuble menaçant ruine, n’ayant pas réalisé les travaux requis pour la réhabilitation de la construction, que lorsqu’elle fait régulièrement usage des pouvoirs d’exécution d’office qui lui sont reconnus Or, l’irrégularité de la procédure résultant de l’illégalité de l’arrêté de péril fait obstacle à ce que soit mis à la charge du propriétaire le coût des travaux ordonnés par cet arrêté et exécutés d’office par la commune.

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En l’espèce, un incendie s’est produit en 1999, endommageant un immeuble. Le Maire de la commune de Marmande a pris un arrêté de péril imminent, le 06 mars 2002, enjoignant au propriétaire de l’immeuble d’effectuer les travaux de sécurisation nécessaires. Sur la base du rapport d’un expert désigné par le Tribunal administratif, identifiant une grave menace à la sécurité publique, le Maire a pris un arrêté de péril ordinaire, le 07 avril 2008, prescrivant la démolition totale de l’immeuble. Toutefois, à défaut de travaux réalisés dans le délai imparti, le Maire a saisi le Tribunal administratif en vue d’obtenir l’autorisation de faire procéder à la démolition de l’immeuble sur le fondement de l’article L 511-2 du Code de la construction et de l’habitation.

En vertu d’une ordonnance rendue le 25 juillet 2008, le propriétaire de l’immeuble a été enjoint de procéder à la démolition, tout en garantissant la conservation des façades sur rues de l’immeuble et de l’immeuble voisin, dans les conditions préconisées par l’architecte des bâtiments de France. Une fois les travaux effectués, la totalité de l’immeuble a été détruite.

Toutefois, le Tribunal administratif de Bordeaux, bien qu’il ait été saisi d’un recours intenté par la Commune contre le propriétaire pour obtenir le paiement du coût des travaux de démolition, a annulé l’arrêté de péril du 07 avril 2008, par jugement du 12 octobre 2010.

Par ailleurs, aux termes d’une décision du 12 septembre 2012, la Cour d’appel d’Agen a estimé les travaux ont été effectués aux frais avancés du propriétaire. Plus encore, ces mêmes travaux ont été autorisés par une ordonnance du juge des référés du Tribunal administratif qui avait d’ailleurs rejeté la demande du propriétaire en suspension de l’arrêté de péril ordinaire. Dès lors, ces travaux devaient être mis à la charge de ce dernier.

En tout état de cause, selon l’article L 511-2 du Code de l’urbanisme, le maire, par un arrêté de péril, peut mettre le propriétaire d’un immeuble menaçant ruine en demeure de faire dans un délai déterminé, selon le cas, les réparations nécessaires pour mettre fin durablement au péril ou les travaux de démolition, ainsi que, s’il y a lieu, de prendre les mesures indispensables pour préserver les bâtiments contigus. Toutefois, cet article ajoute, à son point V que le maire, à défaut de réalisation des travaux dans le délai imparti, par décision motivée, a la faculté de faire procéder d’office à leur exécution. Il peut également faire procéder à la démolition prescrite, sur ordonnance du juge statuant en la forme des référés, rendue à sa demande.

C’est sur cette base que la Cour de cassation estime que « la commune n’agit pour le compte et aux frais du propriétaire que lorsqu’elle fait régulièrement usage des pouvoirs d’exécution d’office qui lui sont reconnus et que, dès lors, l’irrégularité de la procédure résultant de l’illégalité de l’arrêté de péril fait obstacle à ce que soit mis à la charge du propriétaire le coût des travaux ordonnés par cet arrêté et exécutés d’office par la commune, la cour d’appel a violé le texte susvisé ». Ainsi, la Cour de cassation casse et annule la décision rendue en appel en ce qu’elle a condamné le propriétaire au paiement du coût des travaux de démolition.

À propos de l’auteur

COUSSY AVOCATS ENVIRONNEMENT ENERGIE URBANISME

Reconnu en droit de l'énergie et de l'électricité (CRE)
Reconnu en droit de l'environnement
Reconnu en droit de l'urbanisme
Reconnu en droit de la sécurité (CNAPS, CNAC, CIAC)

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