Droit réel de jouissance spéciale – un droit sui generis perpétuel

La Troisième chambre civile de la Cour de cassation a jugé qu’un droit réel sui generis attaché à un lot de copropriété établi pour l’usage et l’utilité des autres lots appartenant à d’autres propriétaires est perpétuel. Cette solution découle de son arrêt n° 17-17.240, rendu le 07 juin 2018.

En l’espèce, une SCI avait acquis plusieurs lots, dont un à usage de piscine. Toutefois, une convention valant additif au règlement de copropriété prévoyait que les propriétaires de ce lot s’engageaient à assumer les coûts engendrés par le fonctionnement de la piscine et à autoriser son accès sans contrepartie au profit des autres copropriétaires. La SCI souhaitait se soustraire à cette obligation, c’est ainsi qu’elle a fait valoir en justice l’expiration des effets de la convention. Ses demandes ayant été rejetées, elle s’est pourvue en cassation, arguant la prohibition des engagements perpétuels.

Aux termes de son arrêt du 07 juin 2018, la Cour de cassation a approuvé la décision rendue en appel. Plus précisément, elle a estimé « qu’est perpétuel un droit réel attaché à un lot de copropriété conférant le bénéfice d’une jouissance spéciale d’un autre lot ». Plus encore, elle a rejoint la cour d’appel qui a jugé « que les droits litigieux, qui avaient été établis en faveur des autres lots de copropriété et constituaient une charge imposée à certains lots, pour l’usage et l’utilité des autres lots appartenant à d’autres propriétaires, étaient des droits réels sui generis trouvant leur source dans le règlement de copropriété et que les parties avaient ainsi exprimé leur volonté de créer des droits et obligations attachés aux lots des copropriétaires » et « qu’il en résulte que ces droits sont perpétuels ».

Fidèle à sa jurisprudence, et étayant son raisonnement retenu dans les arrêts Maison de la poésie 1, n°11-16.304, rendu le 31 octobre 2012, et Maison de la poésie 2, n°14-26.953, rendu le 08 septembre 2016, la Troisième chambre civile de la Cour de cassation a admis d’une part que le droit réel de jouissance spéciale, issu de la volonté de parties (comme en l’espèce, le règlement de copropriété et le convention valant additif), ne trouve pas sa source dans les dispositions du Code civil relatives aux démembrements de propriété. Dès lors, il n’est pas régi par le droit applicable à l’usufruit ou à l’usage d’habitation. D’autre part, la Haute Cour s’est prononcée explicitement sur le caractère potentiellement perpétuel de ce droit réel sui generis.

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COUSSY AVOCATS ENVIRONNEMENT ENERGIE URBANISME

Reconnu en droit de l'énergie et de l'électricité (CRE)
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